POUR L’EUROPE AUSSI, LES AVIONS DE CHASSE PASSENT AVANT LES LOGEMENTS SOCIAUX
#PASDAVIONSDECHASSE
Après l’élection de Trump et le Brexit, tout semble s’accélérer pour faire de l’Europe une puissance militaire. Officiellement, pour garantir la sécurité des citoyens européens. Dans la pratique, pour protéger les intérêts des grandes entreprises.
Avons-nous besoin d’une Europe militaire ?
Le document Global Strategy for the European Union’s Foreign And Security Policy définit les grandes lignes de la politique européenne de défense intérieure et extérieure. Il montre que l’Union européenne (UE) nourrit de grandes ambitions dans le domaine des accords de libre-échange. Les très contestés accords TTIP (avec les États-Unis) et CETA (avec le Canada) doivent être finalisés le plus vite possible. Par ailleurs, l’UE veut également conclure des accords similaires avec le Japon, l’Inde, le Mercosur (union douanière de cinq pays sud-américains)...
L’UE veut protéger ces routes commerciales, de l’océan Indien jusqu’au sud de la mer de Chine, afin de garantir un accès aisé aux produits et matières premières. Donc, selon cette logique, nous devons être militairement préparés, sans nécessairement devoir dépendre de l’Otan ou des États-Unis. L’UE veut donc se développer au plan militaire afin de protéger les intérêts des grandes entreprises européennes. Ce projet est vendu à l’opinion publique comme un plan destiné à assurer davantage de sécurité aux citoyens.1
Que comprend cette Europe militaire ?
L’Union européenne veut développer une plus forte industrie de défense et aller à l’avenir dans le sens d’une armée européenne. Et, à cet effet, tous les moyens sont mis en œuvre. En novembre 2016, l’UE a ainsi accordé pour la première fois des subsides pour un programme de recherche militaire. Il s’agit du Preparatory Action on Defence Research (PADR), auquel 90 millions d’euros ont été octroyés. Un fait historique, puisqu’auparavant, il était exclu que l’on puisse subsidier des recherches ayant des finalités militaires.
L’UE a également mis sur pied un Fonds européen de la défense. Ce fonds financera la recherche sur les technologies militaires, ainsi que le développement et l’achat d’armes. Pour cela, un budget de 40 milliards d’euros étalé sur les dix prochaines années a été libéré : l’UE contribuera pour 10 milliards d’euros, les autres 30 milliards devront provenir des États membres qui ont décidé de participer au projet. La Belgique en fait partie.
23 des 27 États membres de l’UE, dont la Belgique, ont signé en novembre 2017 un accord pour une coopération structurée permanente (PESCO) dans lequel ils s’engagent à augmenter fortement leurs dépenses militaires. Ils s’engagent également à développer une nouvelle capacité afin de pouvoir mener ensemble des opérations militaires. Les fabricants d’armes européens se frottent les mains : l’augmentation du chiffre d’affaire est garanti.
23 des 27 États membres de l’UE, dont la Belgique, ont signé en novembre 2017 un accord pour une coopération structurée permanente (PESCO) dans lequel ils s’engagent à augmenter fortement leurs dépenses militaires. Ils s’engagent également à développer une nouvelle capacité afin de pouvoir mener ensemble des opérations militaires. Les fabricants d’armes européens se frottent les mains : l’augmentation du chiffre d’affaire est garanti.
Les quatre plus grandes entreprises européennes dans l’industrie de la défense sont BAE Systems, Airbus, Leonardo et Thales. En 2015, le chiffre d’affaire total de ces quatre entreprises était de 102 milliards d’euros, dont 40 milliards provenant de l’exportation. À propos d’exportation : où et par qui leurs armes sont utilisées, voilà des questions qui importent peu aux magnats de l’industrie de l’armement. Ainsi, du matériel de guerre belge a servi contre la population du Yémen, et des armes européennes se sont retrouvées dans les mains du groupe terroriste Daech – l’ennemi que nous sommes censés combattre.
Que pense l’Otan de ces plans ?
Le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg est follement enthousiaste. Il souligne l’importance d’une défense européenne forte en tant que force complémentaire à l’Otan. 21 des 27 États membres de l’UE font en effet partie de l’Otan. Stoltenberg pourra donc donner de bonnes nouvelles au président américain Donald Trump lorsqu’il reviendra en Belgique en 2018 pour le prochain sommet de l’Otan. À l’agenda de ce sommet figurera très certainement le point de l’augmentation des budgets de la défense, auxquels les États membres de l’Otan sont priés de consacrer 2% de leur PIB.
Les moyens octroyés par l’accord PESCO permettront aussi de créer deux nouveaux postes de commandement : un poste de commandement Atlantique pour maintenir ouvertes les « lignes de communication » maritimes entre l’Europe et les États-Unis, un poste de commandement Mobilité pour assurer que les troupes et le matériel militaires puissent rapidement se déplacer à travers l’Europe. Stoltenberg espère que les pays européens adapteront leur infrastructure civile comme les routes, les ponts, les chemins de fer, les aéroports et les ports en fonction des besoins militaires de l’Otan. Par exemple, un pont sur lequel circulent aujourd’hui des bus et des voitures doit être renforcé pour pouvoir supporter le passage de tanks. Aux frais de l’État membre, bien sûr. Et cela alors que le besoin d’investissements dans les transports publics est criant ...
L’UE suit-elle le sentier de la guerre de l’Otan ?
L’Otan est une organisation militaire qui n’a qu’une seule solution à tous les problèmes du monde: l’intervention militaire. On répond à la guerre par la guerre. Aux armes par les armes. Au chaos par le chaos. Même pour le changement climatique et la pénurie d’énergie, l’Otan est à la recherche d’une réponse militaire.
Qu’ont apporté les interventions militaires en Afghanistan ou en Libye ? Ce n’est pas un secret que la Libye a été attaquée en raison des intérêts économiques de la France. Dans cette opération, la France a reçu le soutien de la Grande-Bretagne et des États-Unis. Cette attaque de l’Otan a coûté la vie à des milliers de Libyens et a laissé le pays complètement détruit. En 2017, en Libye, on vend des êtres humains comme esclaves, pour 200 à 300 euros.
Est-ce là la voie que veut prendre l’Union européenne ? Que bientôt, nous puissions nous aussi être fiers de nos propres interventions européennes pour aller sauver les intérêts de nos multinationales européennes aux quatre coins du monde ? Le choix de s’engager dans la surenchère militaire est inquiétant et nous met tous en danger. Tant que nous nous laisserons dicter notre politique étrangère par les intérêts économiques des entreprises – « si la manière douce ne marche pas, ce sera par la manière forte » –, les guerres seront inévitables. Et ce sont ces guerres qui augmentent encore l’insécurité dans le monde.
Il est temps que l’UE vraiment investisse réellement dans la sécurité. La sécurité, c’est investir dans les gens, dans les soins de santé, dans l’enseignement, dans les emplois. Il est temps d’investir dans une Europe sociale, et non pas dans une Europe de davantage de guerre.
(1) http://eeas.europa.eu/archives/docs/top_stories/pdf/eugs_review_web.pdf (p.41)
(1) http://eeas.europa.eu/archives/docs/top_stories/pdf/eugs_review_web.pdf (p.41)





