gettingthevoiceout news letter Ces autres prisons que sont les centres fermés – Visite au 127BIS‏

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07/05/2016

Un nouvelle fois, cette visite se révèle pénible et rebutante tant les
conditions de l’enfermement des détenus étrangers surveillés et derrière
les portes fermées sont inacceptables et révoltantes pour tout esprit
sain.Demande de pouvoir entrer avec RTBF-TV refusée à
l’entrée.Vérification des noms, remise de la carte d’identité qui sera
rendue à la sortie uniquement.Passage par détecteur de métaux
(portique). Si ça sonne, déposer tous objets métalliques et repasser
…Dépôt des sacs – rien n’est admis sauf papier-crayon – dans un casier à
l’entrée…..

Ce jour là le centre était occupé par 120 détenu-es.

Un membre de la direction guide, permet l’accès aux « ailes » souhaitées
et permet la rencontre avec des grévistes de la faim.

Nous passons devant des chambres de deux personnes dénommées « chambres
de régime adapté », « pour les détenus qui n’arrivent pas à vivre en
collectivité ».

Avec l’une en grève de la faim depuis plusieurs jours il semble
impossible de communiquer vu son état d’hébétude évident.

Sommes conduits vers une salle commune ; plusieurs dames nous font part
de leur désarroi et incompréhension sur les raisons de leur détention.
Les cas sont édifiants, une dame bien que en processus de demande
d’asile se retrouve enfermée depuis plusieurs jours sans comprendre.

Un dame d’origine congolaise, en Belgique depuis de très nombreuses
années nous raconte qu’elle a fui son pays car persécutée en tant
qu’enfant naturelle. En 2009 elle demande sa régularisation qui lui a
été refusée. S’est retrouvée dans un contrôle routier et immédiatement
emmenée en centre fermé. « Quand vous n’avez pas de papiers, on est rien
du tout ».

Un homme jeune tente de communiquer ce qui est fort difficile étant
donné qu’il ne parle que Farsi (il est probablement Afghan). Il finit
par me demander de le suivre vers sa chambre, je pense que c’est pour
trouver un interprète. Lorsqu’il ouvre sa chambre je suis ahurie : une
forte odeur d’urine, une dame âgée assise à même le sol dans une
position de repli, 4 lits dont le dernier occupé par un homme âgé
allongé, visiblement endormi. L’homme m’indique qu’il s’agit de sa mère
et de son père ! Sous réserve de ma bonne compréhension, le lit du
milieu sur lequel se trouve un lange pour adultes visiblement utilisé,
serait celui du frère… l’homme aurait une sœur en Belgique. L’homme les
yeux emplis de larmes est visiblement désespéré de voir ses parents
traités de la sorte. Il appelle à l’aide de toute urgence. Plus tard sa
mère nous rejoint dans la salle commune et nous implore du regard.

La visite se poursuit chez les hommes où un grand nombre d’entre eux
nous racontent leurs histoires, toutes dramatiques et incompréhensible
humainement. Ils dénoncent en particulier le fait de séparer des
familles, l’un en Belgique depuis 17 ans, arrivé comme mineur pour
étudier, ayant une fille de 8 mois avec une dame qui possède les papiers
obtenus aux Pays-Bas se retrouve enfermé en vue d’expulsion vers le
Maroc. « Je ne connais pas ce pays, je n’ai personne là-bas et ne veux
pas être séparé de ma femme et mon enfant ». Mais l’administration ne
semble pas s’en préoccuper. Il lui a été dit « vous êtes venus ici pour
étudier, pas pour vous marier ».

Un Syrien depuis 9 mois en Belgique ne comprend pas qu’il doit être
rapatrié en Espagne, alors qu’il n’y a pas introduit de demande d’asile.
A été contraint d’y laisser ses empreintes digitales lors de son passage.

Deux hommes grévistes de la faim se partagent un chambre à deux lits un
peu à l’écart. En grève de la faim depuis respectivement le 20 et le 21
avril. L’un, Marocain a affiché les photos de ses fillettes (1 an et 2
ans 1/2) dont la maman est belge. Il souhaitait se marier mais n’y est
pas arrivé et se retrouve actuellement enfermé pour être expulsé vers le
Maroc.

L’autre personne est un Pakistanais qui nous explique les problèmes
graves dans son pays ? Des membres de sa familles y auraient été
assassinés. Il est visiblement fort affaibli.

Il semble qu’ils n’aient plus vu de médecin depuis 3 jours, seulement
l’infirmière qui passe quotidiennement.

2 ou 4 détenus avaient été placés en isolement à titre préventif étant
donné le festival à l’extérieur. Une « analyse des risques » interne a
conclu qu’il était trop risqué de les laisser éventuellement devenir des
fauteurs de troubles.

Les dénonciations les plus virulentes sont adressées à l’encontre de
l’Office des Étrangers qui selon les détenus rencontrés fonctionne de
manière tout à fait arbitraire et choquante et inhumaine.

Autres accusations

l’administration de calmants (voire somnifères) par le médecin lors
de n’importe quelle demande de soins. Ex. mal aux dents, administration
de calmants puisque le détenu serait énervé ; les détenus se décrivent
après la prise de ces médicaments « dans les nuages » ;

le manque de renseignements ex. la liste des associations visiteuses
ne leur est pas connue ; ils ne comprennent pas ce qui les attend ;

le peu de suivi des avocats ex. pas d’accompagnement au tribunal ;
parfois pas de visite du tout ;

problème de compréhension de la langue néerlandaise ;

les rapports avec l’assistant(e) ? sociale ne sont absolument pas
pour les aider. L’attitude est celle de quelqu’un qui ne cherche qu’à
les convaincre d’accepter l’expulsion, se dit concrètement être là pour
cette raison, pas pour aider ; il nous est cité une phrase qu’elle
aurait dite « moi je n’aide personne » ou encore « quand j’entre dans
ce centre, je coupe mes deux mains, comme ça je n’aide personne »…

grave problème de suivi médical ex. un Guinéen qui souffrirait d’une
hépatite B, traité hors centre, il n’a plus reçu de médication depuis
sont enfermement ;

Cette visite ne fait que confirmer le fonctionnement révoltant de ces
centres dans lesquels sont enfermées les personnes dont les documents ne
sont pas en règle pour séjourner en Belgique. Elles/Ils sont pourtant
parmi nous parfois depuis 10, 15 voire 20 ans ! Par ailleurs les durées
d’enfermements sont évidemment très longs, allant jusqu’à 8 mois, par le
biais de voies détournées pour éviter toute libération. Un enfermement
décidé administrativement et de manière aléatoire. Les conditions sont
intolérables.

Une seule solution : fermeture immédiate de ces centres de la honte !