POUR NOS MORTS, PAS UNE MINUTE DE SILENCE #STOPTHEKILLINGS

POUR NOS MORTS, PAS UNE MINUTE DE SILENCE

#STOPTHEKILLINGS




En Colombie, 20 militants paysans, étudiants, environnementalistes et indigènes ont été assassinés depuis début 2016. Et, au Honduras, la situation n’est pas plus reluisante.


La Colombie est le pays le plus dangereux au monde pour les activistes. Dans les régions reculées, des tracts des groupes paramilitaires d’extrême droite, qui contrôlent certaines parties du pays, ont circulé dans des villages en annonçant un « nettoyage social » imminent. Au Honduras, la situation n’est pas plus reluisante.

S’opposer aux multinationales

En cette nuit du 2 mars 2016, Berta Cáceres, secrétaire générale du COPINH, le Conseil des Organisations Populaires et Indigènes du Honduras, dormait paisiblement. Malgré les mesures de protection dont elle faisait l’objet, des criminels se sont introduits chez elle et l’ont assassinée. Quatre autres membres du COPINH ont récemment subi le même sort.
Berta et ses compagnons du COPINH étaient la cible de menaces depuis plusieurs années. Celles-ci s’étaient intensifiées lorsqu’ils se sont opposé à la construction d’un barrage hydroélectrique sur la rivière Gualcarque. Un barrage qui aurait été une catastrophe écologique et aurait provoqué le déplacement de milliers de personnes. Suite à cette lutte, la multinationale Sinohydro a renoncé au contrat en 2013. Mais le gouvernement hondurien, particulièrement enthousiaste à l’idée de favoriser le business des  multinationales, envisage d’octroyer d’autres concessions ailleurs sur la rivière. Des projets qui sont convoités par de grosses entreprises étasuniennes et canadiennes qui voient d’un mauvais œil ces bruyants activistes.
Quatre jours après l’assassinat de Berta Cáceres, Klaus Zapata, artiste engagé et membre du mouvement de jeunes du Parti communiste colombien, jouait au foot avec quelques amis quand un tueur à gages s’est approché de lui et l’a assassiné d’un tir à bout portant.
En Colombie, la recrudescence des assassinats observée ces dernières semaines coïncide avec ce qui devrait être la fin de négociations de paix historiques entre le gouvernement et les FARC, après plus de 65 ans de conflit armé. Cependant, la violence qui se déchaîne actuellement fait craindre le pire pour la majorité de la population, qui veut un pays libéré de la guerre, mais aussi de l’emprise des multinationales qui, avec l’appui des groupes paramilitaires, exploitent des millions de travailleurs dans des plantations et dans des mines.

Que fait l’État ?

Au Honduras comme en Colombie, quand un activiste est assassiné, les autorités invoquent des raisons privées qui justifieraient les meurtres, ou parlent de cas isolés, quant elles ne mettent pas en cause les camarades des victimes. Ainsi, Gustavo Castro, unique témoin visuel de l’assassinat de Berta, raconte comment la justice hondurienne l’a confronté : « Ils ne m’ont montré que des photos des membres du COPINH et des vidéos des manifestations contre la construction du barrage. Mais je n’ai pas vu une seule photo des propriétaires des entreprises impliquées ni de leurs tueurs à gages.
Les menaces contre la vie de Berta étaient telles qu’elle bénéficiait de mesures de protection imposées par la Cour interaméricaine des Droits de l’homme. En Colombie, cette même Cour a ordonné au gouvernement d’octroyer un type de protection similaire aux syndicalistes, aux leaders indigènes, paysans ou politiques de gauche les plus menacés du pays. Cependant, seule une poignée d’entre eux « bénéficient » de ces mesures d’exception. Les activistes qui luttent au jour le jour sur le terrain, dans les zones reculées et difficiles d’accès, sont les premiers à subir la répression brutale financée par les entrepreneurs et les propriétaires terriens.

« Celui qui meurt en luttant... »

Les familles et compagnons de lutte de Berta et Klaus n’ont eu de cesse d’accuser haut et fort les coupables de ces crimes : les paramilitaires, les tueurs à la solde des multinationales et, surtout, les gouvernements qui protègent davantage qu’ils combattent cette criminalité.
En Colombie, l’enterrement de Klaus a pris des tournures de meeting politique. Au passage du cortège funèbre, les voitures klaxonnaient, les passants criaient des slogans, d’autres arboraient des pancartes : « Celui qui meurt en luttant, vit dans chacun de ses camarades. Pour nos morts, pas une minute de silence. »
À la mort de Berta Cáceres, des rassemblements devant les ambassades du Honduras ont eu lieu un peu partout dans le monde, y compris à Bruxelles. Les participants voulaient mettre la pression sur les autorités honduriennes pour qu’une enquête indépendante soit menée, que les coupables soient condamnés et que les mesures adéquates soient prises pour que cela ne se reproduise plus.
Au Honduras même, des dizaines de milliers de personnes ont assisté aux funérailles de Berta. Sa fille, âgée de 14 ans, y a pris la parole : « L’assassinat de ma mère est un crime politique. Nous savons avec certitude que ce qui a motivé son assassinat, c’est sa résistance et sa lutte contre l’exploitation des ressources naturelles. Elle restera à jamais ma plus grande inspiration pour défendre l’environnement.
Depuis plus de 10 ans, la plateforme Stop The Killings réunit des syndicats, des comités de solidarité et des ONG, dont intal, pour dénoncer les meurtres et les persécutions dont sont victimes les défenseurs des droits de l’homme. Chaque année, ils organisent une action le 10 décembre, Journée internationale des droits de l’homme.
Cet article a été publié initiallement sur solidaire.org. La photo de la manifestation a été prise par intal.
Source: Intal 

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